L’avocat pénaliste Alex Ursulet, 68 ans, célèbre pour avoir défendu le tueur en série Guy Georges, est jugé du 10 au 14 novembre par la cour criminelle départementale de Paris. Il est accusé de viol sur une stagiaire avocate de 25 ans, le 30 janvier 2018. L’avocat nie les faits. Il encourt 20 ans de réclusion criminelle.
L’homme est assis à côté de son avocat, les jambes croisées et le soulier ciré, adossé au box des accusés, de fines lunettes dorées posées sur le bout de son nez. Il porte une écharpe, une doudoune sans manches et lève des yeux interrogateurs, un regard « par en dessous », vers le policier qui dépose à la barre de la cour criminelle de Paris. Son autre avocate est en train de l’assaillir de questions sur une enquête qu’il a menée à partir de 2019, et dont il peine à se souvenir les détails, ce lundi 10 novembre 2025, devant la cour. Cette enquête porte sur des faits de viols aggravés, dont l’homme assis est accusé. Il s’appelle Alex Ursulet, il a 68 ans. Il est avocat, tout comme la partie civile.
« Je suis innocent des faits qui me sont reprochés », a-t-il dit plus tôt à la présidente qui l’interrogeait sur sa personnalité. Un enquêteur de personnalité est venu faire le compte rendu de son rapport, une biographie terne et succincte d’un fils de notable martiniquais, père bâtonnier de Fort-de-France (« mon véritable maître ») et mère infirmière, très protectrice. Avec ses parents, la relation est fusionnelle.
Avec les femmes, son comportement est celui d’un « gentleman ». En tout cas, il ne peut séparer le sexe de l’amour, ses femmes viendront le confirmer. L’actuelle n’est autre que la princesse Anne de Bourbon des Deux Siciles, ce qui pose son homme.
Le jour de 1983 où il prête serment, son père lui lance cette phrase : « Tu as toutes les qualités requises pour devenir un grand avocat, mais tu n’as pas la bonne couleur de peau ». Il débute sa carrière au cabinet de François Gibault, devient secrétaire de la conférence (promotion 1986), s’associe à Jacques Vergès dans les années 90 avant de défendre le ministre Alain Carignon et, avec son ex-épouse et consœur Frédérique Pons, le tueur en série Guy Georges. C’est à partir de ce moment que les journalistes commencent à le désigner sous le terme de ténor. « C’est le ténor martiniquais, c’est le plus famous, notre Henri Leclerc à nous », dit un journaliste de France-Antilles François-Xavier G. Cela pose son avocat.
Le nom d’Ursulet est de celui que les aspirants pénalistes ambitieux inscrivent sur leur liste de stage, car il claque sur un CV et recèle la promesse d’expériences rapides et intenses dans l’antre judiciaire. Margaux* est à l’école des avocats de Bordeaux, en stage à Caen, chez Me Sébastien Revel. C’est dans ce cadre qu’elle rencontre Me Ursulet aux assises d’Alençon, en janvier 2017. Il lui lance des œillades et lui promet un stage, dit-elle. Ils prennent contact plus tard et, fin octobre, il signe la convention d’un stage qui doit débuter le 8 janvier 2018.
L’avocat possède deux cabinets. L’un est situé dans sa Martinique natale, l’autre au 53, rue Saint-André des arts, Paris VIe. C’est un rez-de-chaussée biscornu qui descend dans un sous-sol, composé de pièces exiguës et de couloir encombrés. Les stagiaires et collaborateurs n’ont pas de poste de travail attitré. La décoration est sombre, la moquette présente des motifs léopards, les murs sont couverts de tableaux. L’un a particulièrement retenu l’attention de Margaux. Il est accroché dans l’entrée et pièce principale des lieux, et représente une femme qui se pénètre le sexe avec les doigts. C’est là que Margaux débute son stage le 8 janvier 2018.
Le 30 janvier, elle a prévu de déjeuner au restaurant African Lounge, dans le 16ᵉ arrondissement, avec Me Ursulet. Elle lui écrit qu’elle sera en retard, il lui répond qu’elle sera « punie pour cela », façon jeu de domination. Quand elle le rejoint, un cocktail alcoolisé l’attend à table. Me Ursulet, selon les déclarations de la jeune femme, lui aurait alors posé des questions sur la perte de sa virginité, le nombre d’hommes qu’elle avait connus et le plaisir ressenti. Margaux, mal à l’aise, répond succinctement. Le déjeuner s’achève, ils rentrent en taxi.
Arrivés au cabinet, Alex Ursulet lui demande d’entrer seule dans le cabinet afin de l’aviser de la présence ou non de son collaborateur, Joachim L., qui rentre d’une audience au tribunal de Créteil. Le cabinet est vide, elle lui signale par SMS, il entre dans le cabinet.
Alors qu’elle est assise, en robe, les jambes croisées sur un fauteuil, Alex Ursulet lui intime de changer de position afin de mieux voir ses jambes. Margaux s’exécute. Il jette son chargeur à ses pieds et lui demande de le ramasser, puis lui demande d’allumer une cigarette et de la lui mettre à la bouche.
Assis sur un siège à roulette juste à côté d’elle, il se rapproche et commence à l’embrasser et à la sentir. Il baisse son collant, sa culotte, lui introduit plusieurs doigts dans le vagin, à plusieurs reprises. Il lui demande ensuite de se retourner pour se retrouver face à ses fesses et la pénètre de nouveau avec ses doigts. Totalement figée, tétanisée, Margaux ne réagit pas. Il lui montre ensuite qu’il est en érection et lui dit : « c’est bien, on a bien progressé. »
C’est la déclaration que la jeune femme fera au policier qui prend sa plainte le 26 septembre 2019, et qu’elle maintiendra avec constance tout au long de l’instruction. « Margaux n’a jamais changé de version, une version simple et efficace, dans le sens où tout paraissait concordant et sans faille », rapporte le directeur d’enquête à la barre. Alex Ursulet nie intégralement les faits.
Mis en cause disciplinairement avant de l’être au pénal, l’avocat a été radié du barreau de Paris le 31 mars 2019, avant que la cour, en appel, ne décide de surseoir à statuer, préférant lier sa décision à celle de la juridiction criminelle. Le ténor est défendu par ses pairs des hautes sphères du droit pénal parisien : Me Christian Charrière-Bournazel, Marie Burguburu, Frédérique Pons. La ligne de défense est celle d’une machination visant un avocat qui dérange. « Ils ont réussi à détruire le travail de toute une vie. Ça fait 42 ans que je fais ça. Cette décision de radiation a été médiatisée dès le lendemain ; elle a créé un tsunami dans mon cabinet, et maintenant, je suis en redressement », déclare Me Ursulet à la cour criminelle. « On va vous faire vivre l’enfer au pénal », auraient dit ses avocats à celui de Margaux, Me Thibault Laforcade. Ce dernier rapportera au juge d’instruction que les conseils d’Alex Ursulet auraient dévoilé l’identité complète de Margaux à plusieurs rédactions de presse, en espérant qu’elle soit divulguée. Il est aujourd’hui défendu par Mes Fanny Colin, Luc Brossolet et Edouard Martial.
La décision disciplinaire de première instance se fonde sur de nombreux témoignages faisant état de violations des règles déontologiques de la profession d’avocat – qui ont justifié la décision – repris par l’instruction criminelle. Par exemple, le responsable de l’école d’avocat de Versailles veille à ce qu’aucun élève ne fasse son stage final chez Me Ursulet, du fait de mauvaises conditions de travail et de « poussées caractérielles difficiles à gérer », selon les mots d’une ancienne stagiaire. « C’est vrai qu’il m’est arrivé de laisser parler une espèce de caractère, admet-t-il. Je suis un passionné, je suis entier », euphémise-t-il.
Ce caractère a mené plusieurs collaboratrices au surmenage. Attitude colérique et imprévisible, propos rabaissant, il passait de la séduction à l’humiliation au gré de ses humeurs. Le dossier comporte quelques témoignages édifiants ainsi qu’une lettre anonyme. L’expéditrice dit avoir été sa collaboratrice et décrit des agissements pouvant être qualifiés de harcèlement moral et sexuel, ayant pris une photo sous sa robe, à la dérobée, tenant des propos intrusifs et autoritaires.
Ce lundi, par exemple, Aurélie B., ancienne collaboratrice (en 2005) et amante d’Alex Ursulet (dit-elle, il le conteste), a déclaré : « Alex Ursulet a deux personnalités. Des phases claires dans lesquelles c’est le meilleur des hommes, et des phases sombres qui sont à proportion, dramatiques. Il est colérique, impulsif. C’est compliqué au quotidien pour tout le monde. »
Charline P. a été sa collaboratrice quelques mois, à partir de la fin octobre 2016. « J’ai vécu ce que je considère avec du recul avoir été du harcèlement moral et sexuel », témoigne-t-elle devant la cour. « Au départ, il était dans la séduction avec moi, et quand il a compris qu’il n’arriverait pas à ses fins, il était dans l’humiliation ». Elle a observé le comportement versatile, instable de son patron, dont le personnel faisait les frais. « Son prétexte, c’était que la personne ne donnait pas satisfaction, mais je pense qu’il avait besoin de se défouler. » Elle décrit une atmosphère de drague. « Il y a eu des gestes ? » demande la présidente. « Une fois, le soir où il m’a posé des questions sur ma vie intime, si j’avais déjà trompé mon copain, par exemple. Il a quitté le cabinet en me frôlant, et ça m’a mis très mal à l’aise. Je me suis demandée ce qu’il faisait. »
Au cours de l’instruction, Charline P. a déclaré « Alex Ursulet est une personne pleine de haine et de vice qui ne mérite pas d’exercer notre profession », lit la présidente. « De vice ?
— L’ambiance… ce tableau de femme jambe écartée. Les conversations, les dossiers dégueulasses qu’il aimait raconter. Je parle d’un vice moral : je l’ai vu humilier des stagiaires qu’il fait passer pour des débiles, leur hurlant qu’elles avaient été finies au pipi. »
À l’avocat général qui la questionnait : « Il est bouffé par l’aigreur, il a énormément d’ego, il a cherché à me montrer qu’il était supérieur.
— Est-ce que vous parleriez d’une personnalité dominatrice ?
— Oui ».
L’audience se poursuit mercredi 13 novembre, avec l’audition de nombreux témoins qui viendront éclairer un peu mieux le contexte dans lesquels les faits allégués seraient survenus.
*Le prénom a été modifié
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